UN JOUR OU L’AUTRE à l’Artéphile à 10h35 (1h30)

Un Jour ou l'Autre

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Il y a des spectacles qui nous transpercent le cœur en douceur, qui nous emmènent dans un monde ignoré à coups de griffes, à coups d’amour et d’humour… Ce sont des bijoux de finesse où la tendresse n’a d’égale que la cruauté de cette vie pour des êtres oubliés.

« Un jour où l’autre » nous entraîne dans deux mondes dont la connexion ne se dévoile qu’à la toute fin : Il y a d’abord l’univers de Bill et Berta, couple de déficients mentaux vivant dans un logement social, au cœur d’une cité brutale, où tout imprévu les effraie, particulièrement Berta. Leur seul lien avec l’extérieur, c’est la nièce de Bill qui vient les voir une après­-midi par semaine, et pour laquelle ils déroulent un rituel toujours semblable. Mais ce jour là, le grain de sable qui enraye le bon déroulement du rituel est le pain de mie : il n’y en a plus.

Un Jour ou l'Autre 2

Avec un style particulièrement épuré, passant par des touches d’humour et de sarcasme, les deux personnages se chamaillent avec tendresse, se raillent avec amour, boudent avec délectation pour décider si oui ou non, il faut aller en acheter. Lui Bill (Magnifique et touchant André le Hir) joue au capitaine et sous les yeux de sa Dulcinée se sent l’homme Fort. Berta, (exceptionnelle et merveilleuse Line Wiblée), plus fragile, tantôt ingénue et tantôt roublarde, égrène sous nos yeux tous les états de la femme de façon douce et directe, pour garder son homme à la maison.

Dans le second univers d’ « Un jour à l’autre », nous rencontrons Dave et Jackie, dans un café de l’autre côte de la même ville. Lui (formidable, bourru et sensible Eric Herson-­Macarel) est patron de ce café et elle serveuse (belle, distante et émouvante Sarah Vermande), sèche jusqu’à la rudesse, elle égratigne cet homme qui voudrait la séduire. De façon abrupte, elle refuse ses avances… Ces deux êtres tristes et solitaires, sous prétexte d’une bonne nouvelle qu’il lui transmet, vont pour la première fois boire ensemble et à pas hésitants mais sans fioriture, se livrer l’un à l’autre.

Un Jour ou l'Autre 1

L’autrice, Linda MCLean, de son écriture tranchante, simple et brillante met à nu toutes les affres des démunis et tous leurs impossibles rêves, rêves si simples qu’ils nous vont droit au cœur, nous le tordent et le distordent. Dans une mise en scène délicate, originale et inventive de Blandine Pélissier, ces quatre êtres par petites touches d’émotion nous chavirent, nous faisant passer du rire aux larmes sans jamais tomber dans le pathos. Toutes les répliques font mouche, les mots volent et atteignent à chaque fois leur but, les comédiens intenses ne nous laissent aucun répit. Leurs regards s’échappent pour mieux se trouver, leurs corps se frôlent pour mieux se rejeter. Les lumières, la vidéo et l’univers sonore soulignent sans appuyer ce monde des « petits sans importance » et apportent une dimension s’approchant de la tragédie. L’effet est saisissant.

Il ne faut manquer ce spectacle sous aucun prétexte !

T.Volia

 

De Linda Mclean,

Traduction : Sarah Vermande, Blandine Pélissier

Mise en scène : Blandine Pélissier

Avec : André Le Hir, Line Wiblé, Eric Herson-Macarel, Sarah Vermande

Assistanat mise en scène : Behi Djanati Ataï

Scénographie, Costumes : So Beau­Blache

Création Lumière : Xavier Duthu, Véra Martins

Création Sonore : Phil Reptil

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